VSSVD
Rap poétique et son renversant
Rouge EP / promotion tous médias
D’abord, vous lirez mal VSSVD. Puis vous entendrez, le temps d’un trajet sur la ligne 12 ou celui d’un concert dans une foule embrassée, battre le cœur poétique d’ASSAD. C’est que, dans sa signature même, le groupe inscrit le principe de son rap : renversant.
Dès leur premier EP Sabrina, les membres de VSSVD (voix, piano, sax, contrebasse, batterie) allient avec humilité et exigence les couleurs d’une harmonie jazz et les profondeurs d’un flow aux nuances de graves. Attention, nuance ! Car chez VSSVD, le sérieux ne l’est jamais vraiment, et toujours l’on sourit. Avec le deuxième EP, l’hybridité jazz/hip-hop retranscrit toujours avec subtilité et groove une « humeur » – l’amour, la folie, l’addiction – et fait définitivement le cachet du groupe. Oui, sous le nom d’Hypertendresse, c’est une identité artistique qui semble entérinée, puisqu’enfin tout le monde s’accorde à dire : voilà VSSVD.
– Quand déjà voici Rouge.
Bouleversement des membres : du quintet au quartet, la contrebasse laisse place à des basses électroniques plus actuelles. Le drumset, quant à lui, fait de la place au pad. Bouleversement des attentes : qu’en est-il de l’identité du groupe, est-ce toujours VSSVD ? – Bien sûr, écoutez.
– Mais qu’en est-il du rap-jazz ? – Ecoutez, écoutez : l’esthétique a changé, non la poétique ; les moyens, non la fin. Certes, avec ce nouvel EP, VSSVD annonce la couleur : il adhère aux codes d’un rap plus culotté, et en bouscule dans le même temps les frontières, puisque le morceau éponyme est un véritable projet audio-visuel participatif. Mais la couleur, justement, est encore une « humeur ». Rouge amour, rouge passion, rouge vin ; rouge guerre, folie ou sang : l’humeur de Rouge c’est l’ivresse. Et chaque voix, musicale et verbale, travaille à cette humeur non pour peindre le monde, mais le teindre. Sabrina n’a donc pas à rougir de son rire jaune, drôle de couleur et d’humeur qui faisait déjà tomber le rap à la renverse.